Jacques Monod et Francois Jacob ont été les premiers à découvrir comment les gènes étaient induits et réprimés.
JACQUES LUCIEN MONOD (1910-1976)Jacques Lucien Monod est né à Paris le 9 février 1910. Il a grandi sous le soleil de Cannes, lieu du Festival du Film de Cannes. Cela pourrait expliquer pourquoi Monod cherchait à attirer l'attention à lui, comme le ferait un acteur. Lucien, le père de Monod, était artiste portraitiste, et Charlotte Todd, sa mère, venait de Milwaukee, dans l'état du Wisconsin. Enfant, Monod escaladait les rochers, naviguait sur des yachts, chassait les fossiles, et disséquait des chats tout en apprenant à lire le grec et à jouer du violoncelle. A 16 ans il décida de devenir biologiste afin d'expliquer comment les êtres vivants fonctionnent en des termes respectant les lois de la physique. Monod retourna à Paris en 1928 pour étudier les sciences naturelles à la Sorbonne. Il était convaincu que la génétique était la clef pour expliquer la vie en ces termes. Il reçut son diplôme en 1931 et commença un doctorat. A cette époque Boris Ephrussi l'emmena à Caltech, le centre de la génétique. Dans Le Huitième Jour de la Création, Ephrussi se plaignait: "Je l'ai enmené en Californie pour étudier la génétique. Il m'a rendu la vie impossible." Bien que Monod ait confessé qu'il avait bien profité de la vie en Californie, il impressionna les habitants de par ses capacités musicales. Il dirigea des concerts pour des millionnaires américains qui essayèrent de l'engager pour leur orchestre local. Finalement Monod abandonna sa carrière musicale et revint à Paris pour finir son doctorat. Il épousa en 1938 l'archéologue Odette Bruhl et eut deux garçons jumeaux en 1939. Il obtint son doctorat en 1940 et rejoignit la Résistance Française. Pendant la guerre Monod fut nommé chef des opérations des Forces Françaises de l'Intérieur. Il prépara le débarquement des Alliés, organisa des lâchers d'armes en parachute, des bombardements de voies ferrées et des interceptions de courier. Il continua également à travailler sur les bactéries, ces petites créatures qu'il pouvait manipuler comme des produits chimiques. Le travail accompli par Monod avec les bactéries pendant la guerre déboucha par la suite sur la fameuse expérience PaJaMo - étude d'Arthur Pardee, François Jacob, et Monod - qui montra que les bactéries synthétisent un inhibiteur pour réprimer la production de la beta-galactosidase. A l'époque où le système de l'opéron lac était mis en évidence, Monod s'intéressa à l'allostérie. Il nomma ainsi le concept par lequel le site actif d'un enzyme change de forme quand il lie une molécule effectrice "le second secret de la vie". Durant la dernière partie de sa carrière, Monod interpréta les découvertes de la biologie moléculaire pour le grand public dans son livre Le hasard et la nécessité, et dirigea l'Institut Pasteur. Monod est mort le 31 mai 1976 d'une leucémie; ses derniers mots furent "Je cherche à comprendre". FRANCOIS JACOB (1920-2013)François Jacob grandit à Paris avec un sentiment d'injustice. Il voulait un frère et pensait que ses parents lui refusaient le complice et compagnon de jeu auquel il avait droit. Il décida qu'il s'en procurerait un par lui-même, mais savait qu'on en trouve point dans les magasins. Il regardait attentivement les couples s'embrasser après avoir entendu que les baisers faisaient pousser des bébés dans les estomacs des mères. Il était convaincu que la mère devait mordre une partie du père mais il n'avait jamais été témoin du procédé sanglant imaginé et il abandonna. (Jacob eut par la suite quatre enfants avec sa femme Lise de manière classique.) Adolescent Jacob se décrivait lui-même comme étant peu à l'aise avec les filles. Il n'avait pas beaucoup de succès avec les garçons non plus, constamment en conflit avec les brimades des ses camarades de droite qui rejetaient les origines juives de Jacob. Il se battait régulièrement mais gagnait rarement. Jacob était excellent élève à l'école mais éprouvait du ressentiment devant la compartimentalisation des disciplines. Après sa scolarité, Jacob fut attiré par la médecine car la chirurgie lui faisait penser à la sorcellerie. La vue du corps humain et l'atmosphère religieuse de la salle d'opération le fascinaient. Jacob suivi des études de médecine jusqu'à ce que l'invasion allemande le force à s'enfuir en Angleterre en 1940. En Angleterre, Jacob rallia l'armée du Général de Gaulle, la France libre. Il choisit l'artillerie, la branche de sa famille, mais fut obligé de joindre le corps médical. Jacob servit en Afrique du Nord et participa à l'invasion de la Normandie en 1944. Le tir de mitraillette qui transperça son flan durant l'invasion tua son rêve de devenir chirurgien. Néanmoins il finit ses études de médecine après avoir quitté l'hôpital. Afin de compléter sa formation il chercha un projet de thèse rapide et facile. Il étudia les propriétés d'un nouvel antibiotique, la tyrothicine, mais décrivit sa technique de recherche comme "Charlie Chaplin se rend au laboratoire". Malgré sa maladresse et son âge avancé, Jacob voulait se lancer dans une carrière de recherche en génétique. A plusieurs reprises Jacob aborda André Lwoff et son collègue, Jacques Monod, pour obtenir une bourse qui fut refusée à chaque fois. Finalement, à la dernière tentative, Lwoff était de bonne humeur et suggéra à Jacob de commencer à travailler sur "l'induction du prophage". Jacob n'avait aucune idée de ce dont il s'agissait mais accepta le projet. Jacob sortit de son premier séminaire sur l'induction par le lactose abasourdi mais fasciné. Les scientifiques alternaient entre plaisanteries et échanges de questions critiques. "Ce n'était point le monde froid, studieux, figé, légèrement triste, légèrement ennuyeux, que les gens imaginent souvent", rappela-t-il dans son autobiographie. Après avoir obtenu son doctorat en 1954, Jacob resta dans le laboratoire de Lwoff et étudia les phages. Jacques Monod travaillait à l'étage en dessous sur les bactéries. Quand Jacob réalisa qu'ils étudiaient en fait le même sujet - la répression-, Jacob et Monod commencèrent une collaboration qui leur valu le Prix Nobel, à savoir la découverte de l'interrupteur qui allume et éteint la synthèse de la beta-galactosidase. Le déchiffrage par Jacob et Monod de l'opéron lac introduit non seulement le nouveau concept de sites de régulation sur l'ADN, mais également celui de l'ARNm. Les chercheurs devaient postuler l'existence d'une molécule intermédiaire entre l'ADN et la protéine pour tenir compte de la rapide production de l'enzyme. Jacob travailla avec Sydney Brenner lors d'un court séjour en Californie pour vérifier cette hypothèse. |
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